Le temps passé sur les écrans
par Dre Mélissa Généreux, médecin spécialiste en santé publique et professeure à la faculté de médecine et des sciences de la santé
L’hyperconnectivité chez les jeunes
Il n’y pas de doute, les jeunes sont plus nombreux qu’avant à posséder un téléphone intelligent. Le fait d’en posséder un les amène à avoir un accès quasi permanent à Internet, quel que soit l’endroit, et à passer beaucoup de temps en ligne. C’est ce qu’on appelle l’hyperconnectivité. Le temps passé devant les écrans a augmenté au cours des dernières années. Il n’est pas rare, par exemple, que le temps passé sur les réseaux sociaux s’élève à plus de 4 heures par jour chez les jeunes utilisateurs.
Les aspects positifs et négatifs de l’utilisation des écrans
Soulignons que tout n’est pas noir ou blanc. Les écrans, par l’accès à l’Internet et aux réseaux sociaux, peuvent s’accompagner de plusieurs aspects positifs. Ils sont encore plus importants chez les jeunes dits « marginalisés » (en raison d’un handicap, de leur orientation sexuelle ou de genre, etc.). La connectivité peut favoriser la création d’un sentiment d’appartenance à une communauté en ligne. Elle peut aussi favoriser la connexion à des personnes qui partagent les mêmes intérêts. Elle offre également un espace pour s’exprimer et chercher du soutien.
Tout est une question d’équilibre. L’utilisation excessive des écrans (c’est-à-dire un temps trop important passé en ligne) peut engendrer des conséquences négatives sur le bien-être des jeunes, incluant :
- Le manque du sommeil
- La sédentarité et le manque d’activités physiques
- L’isolement et le manque d’activités sociales (dans le monde réel)
- La comparaison sociale et la pression de performance
- La faible estime de soi et l’image corporelle affectée
- La peur de manquer quelque chose (ou « fear of missing out » en anglais)
- Le sentiment de dépendance aux écrans
Conséquences de l’omniprésence des écrans
En d’autres mots, avec l’omniprésence des écrans qui façonne de plus en plus nos vies, on développe moins nos compétences sociales, nos relations interpersonnelles demeurent superficielles, on est inondés d’informations (vraies ou fausses), on devient plus polarisés dans nos idées, on se compare à l’autre plus que jamais, on veut tout, tout de suite, et on perd un temps fou qui pourrait être mieux investi dans le monde réel.
Pour toutes ces raisons, les jeunes qui passent beaucoup de temps en ligne sont plus enclins à présenter des symptômes d’anxiété et de dépression, des troubles du sommeil, des troubles d’attention, des troubles alimentaires ainsi que de la cyberdépendance.
Repérer un usage problématique des réseaux sociaux
Les questions suivantes peuvent aider un parent à repérer un usage problématique des réseaux sociaux chez son enfant :
- Mon enfant pense-t-il souvent aux réseaux sociaux ?
- Mon enfant est-il fâché parce qu’il voudrait passer plus de temps sur les réseaux sociaux, ou se sent-il mal lorsqu’il ne peut pas les utiliser ?
- Mon enfant essaie-t-il de passer moins de temps sur les réseaux sociaux, mais sans succès ?
- Mon enfant utilise-t-il les réseaux sociaux pour échapper à des sentiments négatifs ?
- Mon enfant néglige-t-il d’autres activités et centres d’intérêt (ex. : les passe-temps, le sport) parce qu’il utilise les réseaux sociaux ?
- Mon enfant a-t-il des conflits, se dispute-t-il avec d’autres personnes ou ment-il en lien avec son utilisation des réseaux sociaux ?
Les stratégies des réseaux sociaux pour maximiser l’engagement
Les plateformes de réseaux sociaux sont configurées de manière à maximiser l’engagement et la fidélisation de leurs jeunes utilisateurs. Pour ce faire, elles utilisent plusieurs moyens, telles que les notifications, la lecture automatique de vidéos, le défilement infini (ou « infinite scroll »), l’affichage de la popularité (ex. : les « j’aime ») et les algorithmes proposant des contenus basés sur les intérêts du jeune.
Par ailleurs, c’est précisément lorsqu’on est jeune que notre vulnérabilité aux réseaux sociaux est la plus grande, en raison du cerveau qui est en plein développement et des multiples autres changements qui s’observent à partir de la puberté, tant au niveau physiologique (le corps) que psychologique (l’esprit). Les jeunes utilisateurs des réseaux sociaux sont donc plus susceptibles que les utilisateurs plus âgés d’être affectés par la comparaison sociale et l’opinion par les pairs, tout comme ils sont plus à risque de développer un sentiment de dépendance envers ces plateformes.
Conseils pour une utilisation saine des écrans
Au lieu d’insister sur le temps d’écran, les experts recommandent de favoriser une utilisation saine et de prioriser les activités physiques, scolaires, sociales dans le monde réel, et ce à partir du primaire. Plusieurs conseils pratiques destinés aux parents sont disponibles sur le site PAUSE, qui a été bâti par des experts québécois. En voici quelques-uns :
- Élaborer un plan « écran » familial personnalisé (c’est-à-dire qui correspond aux valeurs et réalités de la famille) et auquel tout le monde adhère
- Ouvrir le dialogue avec son enfant, en se fixant des objectifs communs liés à l’utilisation des écrans et en parlant ouvertement des comportements inacceptables en ligne
- Maintenir des moments et lieux sans écran
- Éviter les écrans au moins une heure avant le coucher
- Prioriser l’utilisation familiale, plutôt que solitaire, des écrans
- Favoriser l’utilisation des écrans dans les aires communes, plutôt que dans la chambre, pour exercer un certain contrôle du contenu
- Favoriser le contenu à caractère éducatif
- Décourager les activités en ligne simultanées
- Donner vous-mêmes l’exemple d’une saine utilisation des écrans
- Encourager les frères et sœurs plus âgés à être « des mentors » des réseaux sociaux (ex. : les pièges à éviter sur certaines plateformes)
- Encourager des activités familiales sans écran et y participer
- Participer au défi 24h PAUSE en famille, en mai à chaque année
- Encourager son enfant à jouer librement à l’extérieur, malgré la possibilité de blessure physique (ex. : grimper, sauter, glisser). Ce type de jeu est aussi appelé « jeu risqué extérieur ». Selon la Société canadienne de pédiatrie, le jeu risqué extérieur permet de développer de meilleures stratégies d’adaptation et prévient l’anxiété.
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